Crédit Agricole, BNP Paribas, Société Générale… Après deux années fastes en Bourse, les grandes banques européennes connaissent une période de repli. Face à cette correction, une question s’impose : faut-il « acheter le creux » (buy the dip), c’est-à-dire profiter des cours actuellement déprimés pour entrer ou se renforcer à moindre coût sur ces valeurs ?
Depuis le creux boursier d’octobre 2022, les banques européennes ont offert une performance exceptionnelle. En mars 2025, l’indice sectoriel mesurant l’évolution des principales valeurs bancaires du continent, dont Crédit Agricole, BNP Paribas ou encore Société Générale, affichait un bond spectaculaire de 137 %.
Une progression d’autant plus marquante que le secteur bancaire était depuis plus d’une décennie boudé par les investisseurs, pénalisé par une croissance molle, des taux d’intérêt extrêmement bas et une rentabilité sous pression.
Ce retournement spectaculaire s’explique notamment par la remontée des taux directeurs, amorcée par la Banque centrale européenne (BCE) dès 2022 pour contenir l’inflation. Le redressement des marges d’intérêt, cœur du métier bancaire, a mécaniquement dopé les résultats et séduit les investisseurs en quête de rendement.
Résultat : à son pic de mars 2025, l’indice boursier des banques européennes retrouvait ses plus hauts niveaux depuis la crise financière de 2008.
Un coup d’arrêt brutal mais temporaire ?
Mais cette dynamique s’est enrayée ces dernières semaines. Depuis ce sommet, l’indice a perdu 24 % dans un contexte international devenu plus tendu. La cause principale : les annonces tarifaires musclées de Donald Trump, dans le cadre de sa campagne présidentielle américaine, qui ont ravivé les craintes de guerre commerciale entre les États-Unis et l’Europe.
Cette menace pèse sur les perspectives de croissance mondiale et incite à la prudence.
Toutefois, ce repli n’a rien d’alarmant sur le fond. « Nous ne sommes pas dans un retournement structurel mais dans une correction technique », explique-t-il.
L’indice a d’ailleurs déjà entamé un rebond partiel, ce qui suggère que les niveaux actuels pourraient représenter une opportunité d’achat plutôt qu’un signal de vente.
Analyse technique : des supports solides
D’un point de vue graphique, les cours des banques européennes sont revenus au contact de niveaux historiques importants : les sommets de 2009 et 2015, désormais considérés comme des « supports » techniques.
Même si ces seuils ont été brièvement franchis à la baisse pendant la correction d’avril, un rebond vigoureux s’est mis en place, renforçant leur rôle de plancher.
Cela conforte la stratégie du « buy the dip » pour les investisseurs avisés. « Les creux actuels ne doivent pas être vus comme des prémices d’une tendance baissière durable mais comme des points d’entrée intéressants à moyen terme. »
Des fondamentaux solides et attractifs
Au-delà des graphiques, les fondamentaux du secteur bancaire européen restent robustes. Les établissements sont bien capitalisés, bénéficiant d’une régulation renforcée et d’une supervision rigoureuse.
De plus, les valorisations en Bourse restent raisonnables : les banques cotent en moyenne 9,1 fois leurs bénéfices, bien en deçà de nombreux autres secteurs.
Autre atout non négligeable pour les investisseurs : le rendement élevé des dividendes. En mars, le secteur offrait un rendement moyen de 5,6 %, un niveau attractif dans un contexte de taux encore relativement élevés mais en voie de normalisation.
Des vents favorables à venir en zone euro
Les perspectives économiques en zone euro offrent également des raisons d’espérer. Le gouvernement allemand prévoit un soutien budgétaire massif dans les années à venir, ce qui pourrait stimuler la croissance de l’ensemble de la zone.
Pour les banques, une activité économique renforcée signifie plus de crédits octroyés, davantage de dépôts et, potentiellement, de meilleures marges.
Cette dynamique semble déjà perceptible. En mars, la croissance des prêts aux ménages dans la zone euro a atteint 1,7 % sur un an, son rythme le plus rapide depuis juin 2023.
Avec une politique monétaire de la BCE qui s’est légèrement détendue, les conditions sont réunies pour que l’activité bancaire poursuive sa reprise.
Prudence à court terme, optimisme à moyen terme
En somme, si la situation reste incertaine à très court terme, notamment à cause des tensions commerciales internationales, les fondamentaux du secteur bancaire européen plaident pour une vision plus constructive à moyen terme.
Acheter les creux sur des valeurs comme Crédit Agricole, BNP Paribas ou Société Générale pourrait ainsi s’avérer être une stratégie payante, à condition de faire preuve de patience.